Rompre avec sa famille
- Marie-Clémence Bordet
- 8 avr.
- 3 min de lecture
J’ai rompu avec un membre de ma famille.
Ça a sûrement été une des épreuves les plus douloureuses que j’ai traversées, mais il y a 3 ans, j’ai rompu définitivement avec ma grand-mère.
Pour remonter le fil, je viens d’une famille très traditionnelle et catholique. Mes grands parents étaient plutôt conservateurs, ma mère vouvoie ses parents etc.
Quand je rencontre Aurore il y a 15 ans et que je l’annonce à ma famille, ma mère préfère cacher ma relation de peur de leur réaction. Ca tient pendant 6 ans.
Ils finissent par l’apprendre et leur réaction est violente. J’entends des phrases comme « tu n’est pas finie, tu restes notre petit fille mais jamais on ne rencontrera Aurore, as-tu parlé à un prêtre avant de commettre ces péchés ? » Bref. C’était horrible.
Mon grand père décède, je deviens maman et quelques mois après, je reçois une lettre de ma grand mère qui me demande pardon. J’apporte tout de suite une nuance, elle dit plutôt « je regrette que mes mots aient pu te blesser, ce n’est pas de ta faute si tu n’as pas su résister au tentateur. » Mais elle dit qu’elle est prête à rencontrer Aurore et ma fille.
Moi, je pardonne, tout de suite. J’ai trop besoin de son amour.
On se voit pendant 2 ans, tout se passe bien, le rêve !
Puis au cours d’un appel téléphonique de routine il y a 3 ans, la discussion dévie et les vannes s’ouvrent.
Elle me dit que je suis un fardeau. Que je suis la plus grande source de tristesse de sa vie. Elle me dit qu’elle regrette de m’avoir envoyé cette lettre il y a 3 ans, car c’est à moi de demander pardon. Pour tout le mal que je fais à ma famille, à elle.
Alors je dis : « Non, je ne vous demanderai pas pardon. Si je suis un fardeau, peut-être que vous seriez soulagée de ne plus avoir de contact avec moi ?»
Elle me répond : « Volontiers. »
Mon monde s’écroule
Je raccroche et pour la 1ère fois de ma vie, je vie une vraie rupture.
Oui j’ai vécu parfois le rejet, j’ai essuyé des insultes etc. Mais jamais je n’avais rompu avec un membre de ma famille pour ça. Jamais. Car chez nous, la famille c’est le plus important. On ne doit pas couper les ponts. C’est mal, et ce n’est pas possible.
Mais je l’ai fait. Je n’ai plus de lien avec elle. Et dieu sait que je l’ai adorée, cette grand mère.
Je me souviens avoir dit à un jour à un membre de ma famille : ce n’est plus ma grand mère. Il m’a répondu : mais tu peux pas dire ça, elle le restera toujours. Ben non, elle l’a été pendant 35 ans, mais aujourd’hui, elle n’a plus cette place dans mon coeur.
Je trouve ça horrible de devoir rompre avec sa famille. Je pensais ça impossible, moi qui avait toujours réussi à garder le lien même dans les moments difficiles.
Ca m’a demandé beaucoup de courage et parfois je suis tentée de reprendre le contact car c’est une vieille femme et que c’est triste de se dire qu’on finira nos vies fâchées. Mais les mots, le rejet, la toxicité, le désamour, l’humiliation, je décide, moi, Marie-Clémence, que ça n’aura pas sa place dans ma vie. Que je mérite le respect, que je n’ai rien fait de mal et que non, je ne demanderai pas pardon.
Alors c’est dur aussi car tout ça prive mes filles d’une arrière grand mère. Elle a voulu les voir, mais j’ai dit non. Car c’est mon rôle en tant que mère de les protéger de personnes qui refusent leur existence.
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