Oui, je me suis déjà sentie l'intrus·e dans ma famille.
Quand j'ai rencontré Aurore il y a 15 ans, ça a été une explosion dans ma vie et dans la vie de ma famille, très traditionnelle, bourgeoise et catholique. Et ce qui était difficile, entre autres, pour moi, c'était cette sensation d'être le mouton noir parmi mes 21 cousins. (oui, 21).
Pourquoi eux, arrivaient-ils à reproduire exactement le même schéma familial que nos parents ? Pourquoi tout semblait si simple pour eux ? Pourquoi eux, quand ils annonçaient leurs mariages, leurs grossesses, tout le monde pleurait de joie quand, pour moi, on pleurait de tristesse ou on allait manifester contre mes droits ?
Je me sentais l'intruse. Moi, je voulais ressembler à tout le monde. Mais je n'étais pas comme eux.
Mais en réalité, j'avais tort. Je me suis trompée sur eux. J'ai compris avec le temps à quel point l'image lisse et publique que certains pouvaient renvoyer, collant parfaitement à ce que nos bonnes familles attendent de nous, n'était en fait qu'une façade. Que je ne les connais pas vraiment. Tous, à un moment, deviennent aussi des intrus. Ils désobéissent. Un divorce, une rupture de lien avec un parent, un manque de pratique religieuse...
J'ai compris que nous sommes tous l'intrus à un moment donné. Parfois c'est visible et c'est difficile de ressentir ça. L'exclusion. La non appartenance. Mais en réalité, quand on comprend que chacun, à un moment de sa vie, aura un moment de déviance, à son niveau, on relativise.
Et ceux qui jugent l'intrus sont juste des personnes qui oublient ce qui fait leur identité profonde et leur singularité.
Alors je contente d'avoir été l'intruse et je souhaite à tout le monde de l'être à un moment donné.
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