Et toi, t'es quoi ?
La 1ère question qu'on m'a posée lorsque j'ai annoncé que j'étais tombée amoureuse d'Aurore, c'était : mais donc t'es lesbienne ?
Et bizarrement, quand mon coeur a fait boom la première fois pour elle, je n'ai même pas pensé à ça. Ni même les jours d'après. J'avais bien saisi que c'était une femme, mais je ne me suis pas dit : oh shit, je me croyais hétéro, me voilà lesbienne !
Comme je ne savais pas répondre, on me disait : "Ah mais tu es bi en fait !"
Ce mot ne me parlait pas non plus.
J'étais juste amoureuse d'Aurore.
J'avais en plus peur qu'en disant un mot dont je n'étais pas sûre, ce soit irréversible ! Genre "Ah mais t'avais dit que t'étais lesbienne, et là tu ressors avec un mec, faut savoir !!"
Comme je n'avais pas de réponse claire, les gens continuaient de me harceler de questions.
Car quand on fait un Coming out, on fait face à énormément de questions très intimes qu'on ne nous a jamais posées par le passé, de type "Vous faites l'amour comment ? Ca t'a fait quoi la 1ère fois ? Elle t'attire physiquement ? Ça t'arrive de penser encore à des mecs ?..." Et je passe les questions encore plus intimes sur ce qu'il y a en dessous de la ceinture pour une personne trans !
Bref, je répondais au max à toutes les questions, pensant que je leur devais ça. Mais n'ayant pas la réponse à la question principale : "Du coup, t'es quoi ?", je suis allée voir ma psy pour lui demander !
Elle m'a dit : "Ok les gens veulent une réponse, mais vous, est-ce que vous vous posez la question ?"
- Ben non.
- Alors on ne va pas chercher ensemble ici quelque chose dont vous n'avez pas besoin, pour faire plaisir aux autres."
Ce jour-là, j'ai arrêté d'y répondre.
Ça va faire 15 ans que j'ai fait mon premier coming out, et je vous jure que je ne me suis pas posée la question. Je suis toujours autant amoureuse d'Aurore et je ne ressens rien pour d'autres personnes. Le mot "pansexuelle" m'a un peu parlé quand il a émergé, parfois je me reconnais dans le mot "lesbienne"... mais je ne sais pas si j'ai besoin de mettre un mot. J'aime ma femme, et je n'ai pas envie de penser à une séparation pour anticiper un truc auquel je ne veux pas penser !
Mais j'ai aussi, par mes rencontres et ce que j'apprends tous les jours encore, compris l'importance de pouvoir s'identifier dans une des lettres LGBTQIA+. Pour certaines personnes, pouvoir se reconnaître, se rattacher, leur permet de se sentir plus fortes, moins seules parfois, de s'assumer, de se relier et de mieux se connaître.
C'est la force de la communauté, et je sais combien elle est puissante aujourd'hui.
Je pense simplement qu'on ne doit pas exiger d'une personne une réponse si elle ne l'apporte pas spontanément. Que les cases, ça peut être rassurant, mais que ça ne définit pas une personne.
Comments